Laisser pleurer ou pas un bébé demeure encore à ce jour un grand sujet polarisé.
Est-ce qu’on vous a déjà dit : « Laisse pleurer ton bébé, il faut qu’il apprenne »?
La prémisse est que votre bébé doit “apprendre” en pleurant, seul, sans qu’on intervienne. Je vous avoue que les oreilles me frisent lorsque j’entends ça.
J’ai envie de répondre : mais il faut qu’il apprenne quoi ?
Qu’est-ce que l’enfant doit apprendre en pleurant ?
Il doit apprendre qu’il ne peut pas compter sur ses parents ?
Il se doit de comprendre qu’il ne peut pas avoir confiance en eux ?
Il faut qu’il comprenne que lorsqu’il émettra des signaux et réclamera ses parents, personne ne viendra ?
Il doit intégrer qu’il ne vaut pas la peine d’être entendu ? Qu’on réponde à son besoin lorsqu’il l’exprime ?
Que doit-il réellement “apprendre” ?
Au fond, cela revient à dire que le bébé doive apprendre à se calmer par lui-même, à s’autoréguler, à gérer ses propres émotions.
Pourquoi ?
Certains répondront que ses parents ne seront pas toujours là dans la vie pour le rassurer et le calmer. Notre société craint tellement que les petits ne deviennent jamais autonome qu’on a tendance à tirer dessus, telle la tige d’une plante en espérant qu’elle grandisse plus vite.
Mais à 6 mois, est-ce qu’un bébé a la CAPACITÉ de s’autoréguler, de se calmer par lui-même ? La réponse est non. Son cerveau n’est pas suffisamment mature. On sait scientifiquement que cela prend un cerveau mature et un néocortex développé pour avoir recours à diverses stratégies de gestion des émotions. Ce processus fait appel à la capacité de résoudre des problèmes et de résonner, ce que le bébé n’a pas la maturité cérébrale d’exécuter. Il n’a pas, comme vous et moi, un cerveau mature d’adulte.
Je connais, et vous aussi j’en suis persuadée, plusieurs adultes qui ont encore de la difficulté à gérer leurs émotions, même passé 20 ou 30 ans. Peut-on donc s’imaginer qu’un bébé de 6 mois soit en mesure de se calmer tout seul ?
Il a BESOIN qu’on réponde à ses pleurs. Un bébé qui pleure est entrain de passer un message. Il nous dit : « J’ai besoin qu’on me reconnaisse lorsque je m’exprime. » Il est entrain de construire la base de la sécurité affective … pour toute sa vie.
Parce que répondre aux pleurs d’un enfant, c’est contribuer à tisser un lien d’attachement, dit sécurisant. Et l’attachement, c’est fondamental pour l’adulte en devenir qu’est le bébé, pour ses relations futures et la manière dont il créera des liens plus tard. Le lien qu’il a avec ses premières figures d’attachement significatives, généralement ses parents, demeure donc primordial.
Pendant la première année de vie, on contribue à bâtir le sentiment de confiance chez l’enfant. Dans un premier temps la confiance en l’adulte, mais aussi sa confiance en lui-même. Par la réponse rapide et adéquate aux besoins exprimés par le bébé, ce dernier intègre qu’il a la capacité d’émettre des signaux assez clairs pour qu’ils soient entendus, reconnus et que son parent soit capable de les interpréter et d’y répondre adéquatement. Le parent peut se tromper et ce n’est pas grave, l’important, c’est qu’il TENTE quelque chose pour répondre aux besoins physiques mais aussi affectifs de son enfant.
Jusqu’à quel âge on réconforte un enfant ?
La réponse : toute la vie …
Pensons-y. Comme adulte, même si on a acquis pour la plupart plusieurs stratégies de gestions des émotions, cela nous fait encore du bien lorsque notre conjoint, une amie ou un proche nous prend dans ses bras d’un câlin sincère pour nous réconforter. On comprend donc que le bébé de 6 mois a encore besoin de ses parents pour s’autoréguler lui aussi.
Jusqu’à 1 an (minimum !) on ne se pose pas de question lorsque l’enfant pleure : on répond, en le prenant dans nos bras, en lui parlant doucement, en le touchant avec affection, en tentant de décoder le besoin exprimé.
Est-ce que c’est dramatique que le bébé pleure seul sur son tapis d’éveil alors qu’on alors qu’on est affairé à couper des carottes ? Non, si on est à côté et qu’on lui parle, qu’on tente de trouver une façon de le rassurer, l’enfant sait qu’il peut compter sur nous. « Ne t’en fais pas William, maman est là, juste à côté de toi, je te rassure. Je me lave les mains et je te prends tout de suite ».
Ce n’est pas le fait que l’enfant pleure qui est le problème, c’est le fait qu’il n’y ait pas de réponse à son besoin. Pleurer, c’est normal, c’est une façon de s’exprimer, de se décharger. On peut avoir un trop-plein d’émotion, un système nerveux surchargé, et pleurer ça fait du bien. Pleurer ce n’est pas grave. C’est l’absence de réponse aux besoins exprimés qui l’est. Laisser pleurer un bébé et ne rien tenter pour répondre à ses signaux, c’est ni plus ni moins de la négligence affective.
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